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Bonjour.

En ce qui me concerne et contre l'avis d'au moins 80% de la population française : Opposée à une quelconque légalisation de l'euthanasie ou pseudo aide au suicide.

Dès que je me lance sur le sujet, j'ai l'habitude de recevoir les foudres des pro-euthanasie. L'argument habituel du "Mon corps, mon choix" n'est valable que si les gens se suicident seuls … ce qu'ils font depuis la nuit des temps, d'ailleurs. Ce ne sont pas les méthodes (efficaces) qui manquent. Quand on demande à quelqu'un d'autre de faire ce qu'on refuse de faire soi-même, l'argument "Mon corps, mon choix" devient caduque.

Le récent projet de loi pour l'aide au suicide sera sans doute adopté d'ici quelques mois. Les réactions de la plupart des gens semblent partagées entre soulagement (enfin) et sentiments d'insuffisance pour une euthanasie plus explicite. La réalité, qu'on parle d'euthanasie, de suicide assisté ou d'aide au suicide, fait que tout ceci n'est que de la sémantique qui va conduire des soignants à tuer leurs congénères. Ce qui est contraire à tout ce que nos professions, nos pratiques nous ont apprises.

Même si ce projet précise qu'aucun soignant non volontaire ne sera forcé à la pratique, j'ai bien peur que cette théorie soit rapidement inapplicable.

* Explication du pourquoi et du parce que :

La médecine se partage entre deux secteurs, public/privé. En médecine privée (cabinets médicaux de ville, cliniques, centre de soins divers), les structures sont libres de choisir leurs patients, leurs soins. Elles sont libres de refuser certains actes, même légaux. En médecine publique, ce n'est pas le cas. Quand un acte est légal, le secteur public doit l'honorer.

Je n'aime pas la comparaison avec l'avortement (un amas de cellules en formation d'1.7g au moment de la date limite définie par la loi n'est pas un être humain mais un simple bourgeon sans aucune autonomie) mais, que je sache, est le seul acte officiellement soumis à une clause de conscience personnelle. Ce qui explique la possibilité des gynéco du secteur privé de tous les refuser si ça leur chante. Mais comme l'avortement est légal, les gynéco du public doivent les assurer.

Le personnel soignant, en particulier dans les hôpitaux publics, est en voie de disparition depuis de nombreuses années compte-tenu de plusieurs choses : salaires peu élevés par rapport aux niveaux d'études exigés, aux responsabilités, conditions de travail déplorables, aucune reconnaissance hiérarchique et administratifs étouffants de règles multiples souvent hors-sol dans la pratique.

Ainsi, moins de gynéco disponibles, des délais de rendez-vous qui se prolongent et tic-tac tic-tac le temps passe et presse pour rester dans les délais légaux. Le nombre de gynéco pratiquant des avortements par obligation du respect de la loi augmente dans les hôpitaux publics.

Vous la voyez venir la future obligation de l'aide au suicide ? Evidemment, contrairement à l'avortement, l'aide au suicide n'a pas de date limite. Les quelques volontaires des premières heures vont vite déchanter si la demande est importante. Au bout de quelques temps, ils se rendront compte de l'horreur qu'est devenue leur pratique et finiront par arrêter. Il faut savoir que, si 80% de la population est pour une légalisation de l'euthanasie, chez les soignants, c'est 80% contre (minimum). Et ce, pour une seule et unique raison : On ne veut pas devenir des tueurs en série.

Autre argument entendu par les pro-euthanasie : Les exemples belge et suisse. D'après ce que j'ai compris, les prix facturés pour ces pratiques sont de plusieurs milliers d'euros. Voilà pourquoi il y a des volontaires, parce qu'il faut payer rubis sur l'ongle pour avoir des candidats. En France, le suicide assisté fera partie de la gamme de soins habituels et aucune rémunération supplémentaire sera effectuée. En Suisse et en Belgique, les acteurs de la pratique ne sont plus soignants mais tueurs à gages. Quand on y met le prix, forcément la conscience est malléable pour certaines personnes.

Ce n'est pas ce qui est prévu en France. Quand il n'y aura plus de volontaires pour le faire gratuitement, que va-t-il se passer ? Suivre l'exemple de nos voisins avec des structures privées et des prix délirants ou forcer les soignants à cette pratique dans les hôpitaux publics ?

Nous avons la sédation profonde pour la fin de vie. Cela fonctionne très bien. Elle est accessible à toute personne chez qui le soin ne sert plus à rien. Les patients meurent de leur maladie en moins d'une semaine (moins de quatre jours dans la majorité des cas) et les soignants ne deviennent pas des assassins. Pourquoi ce ne serait pas suffisant ?

Je me permettrais une dernière remarque : Un tel sujet n'a rien à faire devant un législateur, c'est une affaire personnelle entre le patient, son équipe soignante et sa famille. Avant de vouloir légaliser, une simple dépénalisation pour les quelques cas d'euthanasie médicale pratiqués exceptionnellement serait un plus. Pas besoin d'aller plus loin.

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